Dans une brillante intervention d’environ une heure à l’Ecole Normale Supérieur, René Girard livre le fruit de ses recherches scientifiques et de ses réflexions sur le comportement humain face à la violence. Il explique l’importance des neurones d’imitation dans l’apprentissage et voit la culture comme avant tout l’évitement de la violence. En instaurant l’extériorisation (par le biais de l’échange notamment) et l’interdit, la culture vise à réduire les risques de conflit et, partant, de réduire la violence au sein du groupe. Et pour assurer le respect des interdits, on va utiliser le Sacré. L’interdit ne serait donc pas dû aux complexes de certains dirigeants mais tout simplement au besoin de survie du groupe. Du bouc émissaire à la déification de l’ostracisé, son analyse sociologique des grands mythes apporte un éclairage très enrichissant sur la recherche de la paix par le groupe et sur la gestion de la rivalité qui naît justement de l’apprentissage via les neurones d’imitation. Le sacrifice est une violence catharsiste: par la mise à mort d’une victime unique, révélation de la divinité ostracisée, l’homme unifie ses compagnons autour de lui dans un meurtre collectif. Or, dans le Christianisme, il n’y a plus de sacrifice. Cela est dû à ce qui fonde le Christianisme: le Christ est bien une victime sacrificielle, comme dans tout mythe, la grande différence est qu’il est une victime innocente. Et cela est fondamental car du coup la culpabilité devient humaine et non plus divine. « Notre culpabilité, nous sommes coupables ». Cela empêche l’auto-justification par la désignation d’un coupable extérieur. C’est peut-être là que l’on peut trouver l’une de cause de la violence envers le Christianisme.